Le président de l’Association des personnes vivant avec handicap du Congo (APVHC) et président de Vision Essor- France (VEF), Dilon Jagger AKOUELE, alias Mbengue, a apprécié lors d’un entretien avec le média en ligne ‘’ Datsoue News ‘’ la tenue récemment à Brazzaville du 1er Forum national sur le handicap au Congo. Le président de l’APVHC estime que ces assises donnent un nouvel élan à la problématique du handicap au Congo. De même, il en appelle au respect du choix des personnes vivant avec handicap (PVH) lors du renouvellement des instances du Conseil consultatif.
Datsoue News (D.N) : Etes-vous satisfaits des premières assises du 1er Forum national sur le handicap au Congo ?
Dilon Jagger AKOUELE (D.J.A) : Pour la première expérience du Forum de ce genre, je peux m’estimer heureux pour le ministère qui a pris l’initiative. Pour nous, cet évènement crée un nouvel élan de notre engagement dans notre lutte pour le handicap. Le plus important, ce n’est pas le document que nous avons validé, mais c’est sa mise en application.
D.N : Vous avez validé le document de la stratégie nationale d’inclusion des personnes vivant avec handicap (PVH), qu’attendez-vous de sa mise en application ?
D.J.A : Pour moi, la mise en application de ce document est essentielle parce que ce n’est pas un premier instrument juridique que nous avons mis en place par rapport à la question du handicap au Congo. Nous avons le plan national du handicap, tout le programme qui suit le handicap depuis des décennies, toutefois nous sommes buttés sur le même problème de la mise en application. Ce n’est pas le cadre qui manque. Mais qu’il ait un programme qui s’arrime avec le concept d’inclusion aujourd’hui ; nous ne pouvons que nous en féliciter.
D.N : Quelques recommandations ont été formulées à l’issue du forum, avez-vous prévu un comité pour le suivi et l’évaluation de ces actes ?
D.J.A: Non, par rapport au travail que nous avons fait, il n’y a pas eu un comité mis en place. Au Congo, nous avons un comité national de coordination, de suivi -évaluation de la politique du handicap. Ce comité est présidé par le ministère des affaires sociales, le représentant du Président de la République et le conseil consultatif des PVH. Malheureusement, ce comité ne fonctionne pas normalement, alors que c’était un cadre bien réfléchi pour suivre les politiques du handicap.

D.N : Le problème ne relève-t-il pas de votre part ?
D.J.A : La responsabilité est partagée. Il y a du côté des gouvernants. Je félicite la volonté du Chef de l’Etat de nous donner tous ces cadres juridiques. Nous avons un Conseil consultatif, un très bon cadre. Avec le forum, il est prévu de remettre une direction générale de la personne vivant avec handicap au niveau du ministère des affaires sociales. Autrefois, nous avions eu un ministère, un secrétariat d’Etat qui s’occupait de la problématique du handicap. De notre côté, le problème se pose actuellement au niveau de la représentativité. Nous n’avons qu’un même représentant. La même personne représente toutes les structures du handicap et pour le même résultat qui ne donne pas satisfaction. Cela pose problème. Que les dirigeants puissent comprendre qu’aujourd’hui, il y a beaucoup de trames, beaucoup d’intellectuels dans le milieu des personnes vivant avec handicap qui peuvent occuper ces postes. Ils peuvent assurément donner un résultat différent de celui d’aujourd’hui. Que le Président de la République et tous ceux qui l’entourent puissent faire un effort d’entendre la voix des personnes vivant avec handicap sur les responsables qu’ils veulent mettre à la tête des organes ; au moins donnons-nous cette chance pour exprimer notre volonté lors du renouvellement des instances du conseil consultatif.
D.N : Comment faire pour dynamiser le système et garantir une gouvernance des PVH ?
D.J.A : La question du handicap est transversale. Elle est devenue même une priorité mondiale. Au Congo, l’unique structure qui gère le handicap est une direction centrale, la direction de la réadaptation. Sur le point structurel, cela pose d’énormes difficultés parce que la réadaptation, nous savons ce que cela veut dire. Elle ne peut pas gérer toute la problématique du handicap. En participant à ce forum, nous avons dit que nous allons mettre en place une structure qui sera la nôtre. Ce cadre va servir à la fois de lobbying et de suivi et travaillera avec le ministère qui s’occupe de l’exécution. Mais, je suis plus ou moins satisfait de la recommandation du forum qui précise qu’on est en train de restructurer la chose progressivement jusqu’à arriver à un ministère du handicap.
D.N : La personne vivant avec handicap est-elle acceptée au sein de la société ?
D.J.A : Nous avons au quotidien des problèmes de rejet, d’acceptation. C’est criard. Là encore, il faut dire que les choses ont évolué que les années passées parce qu’il y a une volonté politique qui combat cette discrimination. Le Président de la République nous a donné de la chance d’avoir des structures comme le Conseil consultatif et certains cadres juridiques. Avec l’adoption de la convention des Nations Unies sur l’inclusion, cela donne de la valeur à notre lutte. Ce traité s’impose d’une certaine manière aux gens de nous accepter. Le gouvernement nous donne un quota pour le recrutement. Lorsque nous travaillons, nous sommes valorisées et acceptés au niveau de la famille. Ce n’est pas totalement fini, il y a des milieux très reculés où des personnes vivant avec handicap sont toujours rejetées et d’autres qu’on considère comme des sorciers. C’est pourquoi nous avons parlé au forum de la sensibilisation sur la question de l’inclusion. Nous devrons aussi combattre le repli des PVH afin qu’elles s’ouvrent au monde.
D.N : Vous avez parlé de votre association, quelles sont ses missions ?
D.J.A : Je suis le président de « Vision essor association », c’est une ONG française qui travaille actuellement au Congo, avec les Organisations des personnes vivant avec handicap et le ministère des affaires sociales. Nous envisageons maintenant de signer une convention de partenariat avec le gouvernement congolais.A terme, nous voulons que cette convention permette aux enfants d’intégrer l’école que nous avons créée et prenne leur prise en charge pour continuer les études ailleurs. Cette école sociale va accompagner le ministère des affaires sociales à prendre en charge des personnes vivant avec handicap qui n’ont pas pu aller à l’école et les enfants démunis qui trainent dans la rue. L’école est ouverte à Brazzaville, à l’Académie militaire. Elle applique le programme français.
D.N : Pour clore cet entretien, quel est votre message à l’endroit des PVH ?
D.J.A : Mon dernier mot, c’est de souhaiter vivement l’unité dans notre corporation. Que nous soyons de plus en plus unis surtout pour les causes les plus essentielles. Personnellement, je suis en train de travailler pour cette unité. Je crois que nous sommes sur la bonne voie et cela va arriver. Je souhaite que les gens puissent le comprendre différemment. Que cette unité ne soit pas dans le sens d’une seule organisation. Nous sommes au Congo où nous avons les départements, les ethnies, mais le pays reste uni et indivisible. Nous pouvons avoir dix mille organisations associatives, pour les PVH, cela ne change rien puisque la lutte est unique. Donc, nous sommes unis et nous le devons l’être.
Propos recueillis par Flore de Jésus.