L’Agence universitaire de la francophonie (AUF) a organisé une semaine de la langue française du 19 au 31 Mars 2025 en lien avec la journée internationale de la française. Cette célébration s’est achevée par une présentation passionnante   sur ‘’ la poésie en français et l’utilité des poètes’’. Cette activité interactive avec les étudiants a été animée par les membres du Club Agoratoire Académie (CAA). Dans un entretien avec le média en ligne ‘’ Datsoue News’’, Rolf Rodrichel Ngono Malanda, Doctorant en Grammaire linguistique française à la faculté des lettres, arts et sciences humaines (FLASH), Secrétaire général et coach en art oratoire et prise de parole en public du ‘’ Club Agoratoire Académie,’’ souligne l’impact des mots et l’importance des poètes dans la société.

Datsoue News (DN) : L’ AUF vient de clôturer la semaine de la francophonie par la poésie, que cela représente pour vous ?

Rolf Rodrichel Ngono Malanda (R.R.N.M) :  La semaine de la francophonie est un évènement qui célèbre non seulement la littérature, mais surtout l’impact des écrivains dans notre société. Vous savez que, depuis longtemps, on a relégué les poètes au second plan et aujourd’hui organiser une telle activité sur la poésie, c’est non seulement reconnaître aux poètes leur place dans la société, mais aussi l’impact que peut avoir la poésie sur l’usage de notre langue. Les mots traînent dans les dictionnaires. Mais, chaque personne a une façon particulière d’utiliser les mots et les poètes sont les maîtres dans ce domaine. On ne peut pas célébrer la langue française sans célébrer la poésie.

DN : La poésie ne suscite plus de nos jours d’engouement comme au temps des Tchicaya U Tam’si, Sony Labou Tansi et bien d’autres écrivains congolais. Qu’est-ce qui explique ce manque d’intérêt ?

R.R.N.M :  Oui, il y a comme une perte de vitesse. Mais, je ne dirais pas que les poètes ne produisent plus. La perte de vitesse se situe plutôt au niveau du public. Il n’y a plus assez de promotion des ouvrages des écrivains. On ne vulgarise plus les travaux des poètes. Sinon lorsqu’on regarde le nombre de recueils publié dans les maisons d’édition, il y en a tellement qu’on se demande où est- ce que les poètes trouvent l’inspiration ? Les poètes écrivent, mais il manque la promotion et la vulgarisation. C’est même la raison d’être de cette activité. Ce que nous faisons à notre niveau, c’est de rassembler les jeunes chaque mois autour d’un livre et on choisit des thématiques qui ont un impact dans la société. Vous avez assisté à deux débats : si les poètes étaient à supprimer. On a vu de part et d’autre que les poètes avaient un apport. Tout ce que nous faisons c’est de vulgariser ces livres en rassemblant les jeunes autour des débats alléchants et structurants.

DN : Alors, à qui incombe la responsabilité de faire la promotion des ouvrages des écrivains?

R.R.N.M :   Je dirais en premier, ce sont les auteurs eux-mêmes. Nous savons bien que les auteurs ont des idées, mais ils n’ont pas forcément les moyens nécessaires. Nous sommes aujourd’hui dans un monde ultra numérisé, on ne peut pas faire de promotion sans les moyens. Passer dans les médias, dans les réseaux sociaux, c’est difficile. Il y a d’abord les acteurs des médias et ensuite les décideurs, le ministère de la culture qui doit faire en sorte que le livre soit disponible. C’est une activité qui nécessite l’apport et la participation de tout le monde. La contribution  des autorités culturelles et éducatives s’avèrent nécessaire pour donner de l’importance aux poètes   afin qu’ils soient reconnus partout et que le livre soit disponible et à la portée de tous.

DN : Quel est l’impact de la poésie au niveau du Congo aujourd’hui ?

R.R.N.M :   La poésie a un impact considérable. Elle est le sac à sagesse. C’est dans la poésie que l’on retrouve tout ce qu’on voit sur le plan culturel et intellectuel. Si vous prenez aujourd’hui des poèmes tels que  » Soit prudent  » d’Enock Mabassi, vous saurez que dans la vie, l’homme a intérêt à être prudent. Il faut que les membres soient les instruments du devoir et non des sources de peines. Ainsi , la poésie éduque. Elle a un impact considérable sur les mentalités et l’éveil des consciences.

DN :  Peut-on dire que le but visé lors des activités liées à la semaine de la francophonie a-t-il été atteint ?

R.R.N.M :   Oui, le but a été atteint. Nous avons eu des activités qui ont attiré plus de public jusqu’à le garder de 12h à 16h tel que le café du savoir sur ‘’ la poésie en français et l’utilité des poètes ‘’.  Cela prouve qu’il y a eu un intérêt que le public accorde à ces activités. Notre objectif principal était de faire passer le message qu’il y a une nouvelle génération d’écrivains qu’il ne faut pas ignorer. Ce que je dirais en conclusion, c’est d’inviter la jeunesse à nous rejoindre autour de ce projet très inspirant et éducatif dénommé ‘’ Agoratoire Académie ‘’.  On ne peut pas aujourd’hui devenir leader si on ne sait pas parler en public, ni structurer un discours, ni convaincre par les mots. Si le monde se brûle et brûle, c’est parce qu’il y a des mots qui sont mal placés. quand quelqu’un veut justifier son action inappropriée, il ne va pas jouer sur l’argent et les médias, c’est d’abord sur les mots. Il va détourner les mots de leur sens. Ce qui est appelé guerre sera appelé par exemple opération militaire ou opération spécifique.  Mais à la base, c’est une guerre. C’est pour dire que la maîtrise des mots nous donne de l’avantage sur les maux qui minent le  monde.

Propos recueillis par Orland Alain.