L’humanité célèbre, le 22 mai de chaque année, la journée internationale de la biodiversité. Dans le cadre de cette commémoration, l’ONG Éveil d’Afrique a organisé, le 21 mai 2025, à Brazzaville, une journée scientifique.
Cette rencontre a permis aux experts et acteurs de la société civile engagés sur les questions de la préservation et la protection de l’environnement, de lutte contre le changement climatique, d’évaluer la situation de la biodiversité en République du Congo. Au cours de cette conférence scientifique, quatre thématiques ont été développées par les experts en forêt-environnement. L’expert en projets marché carbone et environnement, GeorgesClaver Boundzanga,a animé le panel sur la thématique des enjeux de la biodiversité et la valorisation des crédits carbones. Dans son intervention, il a déploré le non-paiement des 42 millions de dollars américains des crédits carbones. Il a appelé, au cours d’un entretien avec le média en ligne Datsoue news, le gouvernement et la Banque mondiale à s’assoir pour débloquer cette situation.
Datsoue News : Quelle est concrètement la situation de la biodiversité en République du Congo ?
Georges Claver Boundzanga (GCB) : Nous avons une très riche biodiversité mais qui n’est pas connue. Nous avons eu un premier document de la stratégie nationale qui a fait la cartographie de la biodiversité au Congo. Nous nous sommes rendu compte qu’il y a beaucoup d’espèces de biodiversité qui n’étaient pas inscrites dans le premier document. Actuellement, nous sommes en train de rédiger le deuxième document de la stratégie. Ce document recensera les espèces qui n’ont pas été prises en compte parce que la recherche n’est pas mise au-devant. Or, le domaine de la biodiversité nécessite à mettre en avant les chercheurs et les populations autochtones qui ont la connaissance approfondie de cette ressource. Donc, nous devons associer les populations locales, les autochtones et les chercheurs pour que nous puissions avoir l’inventaire complet de notre biodiversité. Il manque encore beaucoup de choses puisque les inventaires ne sont pas réalisés sur toute l’étendue du territoire national qui regorge encore plusieurs espèces non connues. Les défis sont énormes parce qu’il y a un problème de financement pour faire la recherche, les inventaires de biodiversité et aller vers cette initiative qui se met en place au niveau mondial à savoir, les crédits de biodiversité.

Les acteurs de la société civile et les experts en forêt-environnement lors de la conférence scientifique.
DN : dans votre intervention, vous avez mentionné les 42 millions de dollars américains pour les crédits carbones qui se trouvent au niveau du groupe de la Banque mondiale, pourquoi cet argent n’est-il pas débloqué ?
GCB : Il s’agit d’un vaste programme qu’on appelle réduction des émissions Sangha – Likouala qui a été mis en place dans le cadre du processus Redd+ de 2020 à 2024. Deux contrats ont été signés par le gouvernement congolais à travers le ministère des Finances et la direction des opérations de la Banque mondiale depuis 2021. Il était question que les crédits carbones générés par les efforts des forestiers, des agro-industriels, des communautés locales et des populations autochtones, en 2020, 2021, 2022, 2023,2024, soient payés. Malheureusement, le paiement n’est pas encore effectif. Alors qu’il est établi autour de 41,8 millions de dollars américains. Normalement, les premiers paiements devraient être effectués parce que les évaluations, le rapport de suivi – évaluation de 2020, ont été validés. Les paiements pour 2020 devraient déjà être perçus. Mais, quelques tractations et complications subsistent encore.
DN : Qu’est ce qui bloque pour que ces paiements soient effectifs ?
GCB : le programme est géré par le gouvernement. Les bénéficiaires de ce programme attendent le paiement. Les forestiers, les agro-industriels, les populations locales et les autochtones ont fourni les efforts pour réduire ces émissions. Ils attendent ce paiement. C’est vrai qu’il y a une complexité dans le cadre des crédits carbones. Mais, le décaissement de ces fonds tarde encore. Or, nous sommes arrivés pratiquement à la fin du projet qui était prévue pour l’année 2024. La clôture définitive de ce projet interviendra en 2025 parce que les derniers financements devraient arriver à la fin de la même année. Ainsi, on demande aux parties prenantes, au gouvernement et à la Banque mondiale, de s’asseoir pour voir comment débloquer cette situation.
DN : Comment faire pour valoriser la biodiversité congolaise ?
GCB : Nous avons au niveau de la biodiversité des niches financières qui peuvent permettre au Congo de mettre en place des certificats de biodiversité de manière à les monétiser en termes de conservation. Il y a des initiatives qui se développent en dehors des crédits carbones. Au plan national, nous devons commencer à communiquer sur l’initiative des crédits de biodiversité. C’est sur cette base que nous pouvons aller vers le développement des crédits de biodiversité. Pour tirer profit de ces crédits, il faut connaitre le potentiel national de biodiversité que nous avons sur toute l’étendue du territoire congolais. Les autorités devraient engager le processus de consolidation de la stratégie nationale sur la biodiversité. Ce document va aider les décideurs à poursuivre l’initiative que nous sommes en train de développer sur la biodiversité.
Propos recueillis par Orland Alain.